Dax 4ème corrida de la feria. . Arène pleine.

Six toros de El Freixo (propriété du matador El Juli). Vuelta du 3ème « Alejado »n°14 né en 09:2020, negro mulato de 537 kilos.

MIGUEL ÁNGEL PERERA, oreille, pétition de la seconde, deux tours de piste et forte bronca au président et deux oreilles.

DANIEL LUQUE, deux oreilles et oreille.

BORJA JIMÉNEZ, Oreille et deux oreilles.

Salut du picador Tito Sandoval au 3ème.

Brindis de Borja Jimenez au Juli au 3ème.

Le Trois toreros sont sortis par la Porte du Prince accompagné du mayoral d’El Freixo.

C’était noël en plein mois d’août sur les rives de l’Adour… El Juli qui a tant brillé dans son costume de lumières dans le ruedo dacquois avait mis son habit de ganadero pour extraire de sa hotte les plus beaux des cadeaux dont le aficionados, éternels enfants, désirent : six toros de rêve ; matière à des travaux magiques menés par un trio inspiré pour une tarde qui fera date dans l’Histoire des arènes dacquoises qui comptent pourtant de nombreux succès…

Bien présentés, sans excès, ronds, raisonnables de trapio et d’armure, les toros de l’élevage créé par El Juli ont eu un moral d’acier. On dit que les toros ressemblent à leur patron et ce fut le cas : je plie mais ne rompt pas telle est la devise des toros de Julian. Ils sont allés à la pique en partant de loin avec entrain mais sans s’employer beaucoup ; sauf le 3ème auteur d’un tiers de varas magnifiquement éxécuté par le grand picador Tito Sandoval. Mais c’est au troisième tiers qu’ils révélèrent leurs qualités dans les mains expertes qui les menaient. En ce sens, comme nous l’avions vu à Marbella, la ganaderia du Juli s’inscrit dans le tropisme de la corrida moderne, centrée désormais sur la faena de muleta. Mais la grande différence c’est que la mièvrerie, la fadeur ont été éliminées pour ne garder que la noblesse piquante, agressive qu’il faut dominer pour triompher.

D’emblée, Miguel Angel Perera a mis la barre très haute et sa première faena a atteint les sommets ce qui a été parfaitement perçu par le public. Muletero de génie, Perera a des allures de lord Anglais, il met toujours une certaine distance entre les tendidos et lu,i préférant se concentrer sur son toreo. On peut dire que l’ensemble de sa première, faena qui est allée de menos à màs a atteint le zénith dans sa phase finale. Jamais il ne fit toucher la muleta, toujours il donna l’importance nécessaire à l’adversaire en le citant de loin, tout cela sur rythme serein sans aucune démagogie. Une entière pour conclure. La double récompense ne faisant pas de doute le conclave se mit en colère contre le palco qui ne voulait pas la céder et les choses auraient pu mal tourner devant cette iniquité. Pêché de jeunesse ?

Placide Perera se contenta de l’ovation populaire et remit le couvert à son second passage. Le toro avait moins de brio mais la faena la même rigueur dans sa construction, le même engagement et se termina par une épée entière. Le président eut le bon goût de mettre d’emblée les deux mouchoirs en guise de réconciliation…

Daniel Luque ne voulait pas sur ses terres perdre ses prérogatives. Il trouva les deux adversaires à son goût, menant de longues séries en raccourcissant les terrains et choisissant la courbe plutôt que la ligne rectiligne de Perera. Cette géométrie est celle du charme et de la séduction et bien qu’il en ait usé très souvent, cela fonctionne comme au premier jour. Mention pour sa seconde faena face au plus faible du lot et à celui qui avait le moins d’expression. Sa douceur, sa science des terrains lui permirent   de retenir une nouvelle fois l’attention et après une nouvelle estocade d’effet rapide de couper un troisième trophée qui le mettait à égalité avec Perera : l’objectif du jour.

Sans hésiter Borja Jimenez partit deux fois à porta gayola et avec cette suerte périlleuse il se mit le public dans la poche, sensible à cet enthousiasme juvénile. Borja se montra un solide et profond capeador exécutant plusieurs quites par chiculenas serrées et par tafalleras. La sincérité du sévillan plut et il sut, face au premier surtout, s’imposer lui aussi à la caste énergique qui lui était opposée. Pas de maîtrise hautaine comme Perera à qui tout semble facile, pas de brio élégant comme Luque, mais une entrega de tous les moments à laquelle on ne peut rester indifférend. Il tua bien et gagna justement le droit de sortir à l’égal de ses Maîtres par la porte prestigieuse qui s’ouvre sur le parc Théodore Denis.

Pierre Vidal

Photos B. Caritey