La vie, pour nous, ne saurait se circonscrire au redondel d’une arène. Nous ne sommes pas des idiots, tout ce qui se passe dans le monde nous concerne. On voit d’ailleurs que les avancées ou les défaites du monde taurin correspondent à des évolutions qui traversent les sociétés en profondeur. On ne peut pas envisager la tauromachie comme une fin en soi ; comme l’unique centre de nos intérêts. Ainsi nous sommes aujourd’hui sensibles aux souffrances du monde paysan, à leurs revendications, à leur mouvement.
D’abord parce que les paysans en colère vivent de la terre comme l’essentiel des professionnels de la tauromachie –et aussi du public taurin. Nos éleveurs de toros de combats, nos ganaderos landais ou nos manadiers de la Camargue vivent les mêmes difficultés, la même astreinte, la même précarité. Ils font ce métier avec la même passion et le même dévouement. Avec une générosité que l’on ne saluera jamais assez.
Ensuite parce que nous avons les mêmes adversaires –je n’ai pas dit ennemis- assis dans leurs bureaux des grandes cités déshumanisées, loin de la nature, de ses vicissitudes et de sa beauté. Ceux qui ont les yeux tournés vers Bruxelles, la cité idéale d’où devrait naître la prospérité et le bonheur mais qui ne fait que multiplier les réglementations, semer le cahos bureaucratique et qui a programmé en réalité la disparition cynique d’une grande partie d’entre eux –comme elle l’a déjà fait avec les sidérurgistes de Lorraine.
Le mépris que la société paysanne essuie dure depuis des années. Il se manifeste par l’abandon des langues régionales, l’interdiction des chasses traditionnelles, les obstacles que l’on multiplie pour les fêtes votives, les déserte ruraux, la multiplication des règlements tatillons. La tauromachie est évidemment dans l’œil de ce cyclone et les attaques qui sont menées contre elles sont avant tout l’expression d’un racisme social, d’une sorte de haine contre la ruralité. Elle est fomenté par la couche sociale supérieure, privilégiée, jeune – trop souvent- et citadine. C’est elle qui prétend dicter sa loi. Elle s’est donnée pour mission de, quoiqu’il en coûte, « sauver la planète ». Expression stupide comme l’indique le grand écrivain Erik Orsenna car ce n’est pas la planète qu’il faut sauver –elle en a vu d’autres- mais l’Homme: l’espèce humaine qui ne cesse de s’entretuer et dont les ambitions démesurées représentent un danger bien réel, pour le coup.
La tauromachie, on ne le dira jamais assez, c’est la défense concrète de la biodiversité, le maintien de paysages intacts, un élevage respectueux des animaux. C’est aujourd’hui l’agriculture de demain. Un exemple pour tous. Comme est exemplaire le courage que manifestera l’homme face à l’animal sauvage, quand ils seront face à face dans l’arène.
Ce sont nos frères qui encerclent Paris et nous voulons ici saluer leur combat pour ne pas disparaître de l’Histoire.
Pierre Vidal