Vic-Fezensac. Troisième corrida de feria, arène bien fréquentée, course sous les nuages mais sans pluie, deux heures trente de spectacle. Six toros de Dolores Aguirre Ybarra, tous très bien présentés, lourds, redoutablement armés, au total vingt et une piques, trois, pour les trois premiers, quatre châtiments pour les trois autres. Toujours très compliqués à la muleta. Un immense lot de toro avec le premier, deuxième et sixième applaudi à leur entrée, le quatrième applaudi à l’arrastre et le dernier primé d’une vuelta.

Alberto Lamelas (bleu ciel et or), au premier, une entière basse, silence ; au quatrième une entière basse, silence.

Damian Castaño (bleu marine et or), au deuxième, un pinchazo et une demi-lame, salut, au cinquième, une entière et trois descabellos, silence.

Luis Gerpe (vert et or), au troisième, un quart de lame, un pinchazo, une entière avis, salut ; au dernier, une entière, une oreille.

Président Bernard Sicet, assesseurs, Mathieu Cazalet et Lorenzo Cuello.

Une corrida qui meublera longtemps la mémoire des aficionados… Des toros de Dolores Aguirre Ybarra en provenance directe de l’univers de Goya, surtout les trois derniers. Des luttes épiques face aux picadors. Des hommes qui ont été obligé de se surpasser, peut-être même de surmonter leur peur, de ces corridas éternelles qui nous rappelle l’éthique de la tauromachie.

La pluie du matin avait enfin cessé permettant de refaire la piste en un temps record, oublié le bourbier du matin lorsque jaillit en piste Caracorta, sérieux mais pas immense il allait poser de sérieux problèmes à Alberto Lamelas. Le petit Madrilène fut souvent obligé de rompre de se replacer avant de pouvoir signer une belle série à la fin de sa première faena. Lorsque le garçon vit surgir son second opposant, il a dû penser qu’il portait bien son nom « Carafea », En fait une sale gueule, avec des cornes à toucher les nuages, un gabarit d’enfer, haut et long à n’en plus finir. Mais Alberto ne renonça pas, fit passer le grand frisson avec des passes dans le dos et finit par s’imposer sur l’animal. Mais quelle sale gueule pensait le torero en regagnant le callejon.

Les choses ne furent guère plus simples pour Damian Castaño avec un premier toro qui lui laissa quelques chances de réussite sur les deux mains. Il fut très harmonieux et dans un rythme très lent avec pareil animal. Il fut plus réservé avec le cinquième. Très vite en difficulté, avisé à plusieurs reprises, il décida d’en terminer rapidement.

Luis Gerpe se fait souvent rare, passons rapidement sur sa première sortie avec tout de même quelques jolies passes sur les deux mains, des muletazos interminables qui s’alanguissaient sur le sable. Mais lui Gerpe trouva toute sa dimension avec le dernier, un certain Perdigon qui avait allègrement pris quatre piques. Soudain il monta sur les cornes, déplia la muleta, et sur la main gauche toréa avec calme et lenteur, étonnant de voir le monstre se plier à ce rythme. Il avait ouvert avec quelques passes de châtiment rageuses et terminait avec un temple étonnant. Soudain l’épée surgissait et clouait l’animal. Luis Gerpe coupait la seule oreille de la course. Mais hier dimanche, à Vic, il y avait du toro, rien que du toro. Un dernier salut du mayoral et l’on range cette course au premier rang de nos mémoires d’aficionados.

Jean-Michel Dussol

Galerie photo Bertrand Caritey