Plaza de toros de Azpeitia, Guipuzkoa. Troisième de la Feria de San Ignacio 2024. Plus de 3/4 d’entrée.
Toros de Murteira Grave, bien présentés et de bons jeux dans l’ensemble, tous applaudis à l’arrastre.‘Almirante’, le cinquième n°47 negro mulato, né en 12/19 de 520 kilos a été gracié.
• CLEMENTE, oreille et vuelta al ruedo après une pétition.
JESÚS ENRIQUE COLOMBO, ovation et saluts et deux oreilles et la queue symboliques.
JORGE MARTÍNEZ, ovation saluts et ovation et saluts après avis.
Il s’agissait du premier indulto dans l’histoire des arènes d’Azpeitia.
Après le paseo le prix du meilleur toro 2023 a été remis en piste à M. Muteira Grave
Les arènes d’Azpeitia une des plus anciennes du nord de l’Espagne (121 ans cette année) ont donc cette après-midi, vécue leur premier indulto avec celui d’ »Almirante » qui après un long et puissant combat a pris de lui-même le chemin des corrals à peine sollicité. C’est un moment historique pour la longue tradition taurine du Guipuzkoa, pour l’éleveur portugais Muteira Grave qui voit-là la récompense suprême d’un long travail de remodelage de sa ganaderia, pour le matador Jésus Enrique Colombo et pour le public qui aura vibré comme rarement. Le fait que Colombo soit vénézuélien est une sorte de pied de nez à l’actualité qui voit les fossoyeurs de la tauromachie dans cette grande nation, contestés massivement par le peuple. Le succès de Colombo hier c’est l’aboutissement de la grande tradition taurine martyrisée par Maduro et ses sbires, obligée de s’expatrier mais qui triomphe tout de même comme avant lui les frères Gijon ou encore Morenito de Maracay.
Le lot de Muteira Grave parfaitement présenté, sérieux, armé, harmonieux a séduit par son comportement. Il y avait chez tous les toros de la caste qui ne s‘est pas toujours exprimée au cheval mais qui a permis des combats acharnés, mettant les matadors en difficulté par la pression prtée sur chacun d’eux. Le roi de la soirée fut donc « Almirante » toro exceptionnel réellement qui après avoir supporté une pique puis un tiers de banderilles musclé est arrivé à la muleta frais comme un gardon. Il plongea avec détermination dans l’étoffe, sans jamais mollir, sans s’épuiser. L’arène demanda la grâce unanimement et la présidente ne se fit pas prier. Bravo ! N’en déplaisent aux irréductibles pisse-froids.
La lumière ira donc sur Colombo mais elle aurait pu aller sur Clemente tant sa prestation fut volontaire et digne. On vit trop brièvement au capote ses bonnes manières; par la suite il lui fallut batailler à la muleta pour tempérer et dominer la caste de ses deux adversaires. C’était parfois un peu beaucoup pour le jeune bordelais mais on ne contestera pas son engagement, sa volonté de faire les choses bien et dans l’ensemble une prestation digne qui l’honore : sa réussite à l’épée en étant un des gages. Il aurait pu couper une seconde oreille à son second passage où son arrimon toucha les tendidos mais la pétition resta minoritaire. Une occasion manquée peut-être mais aussi une manière de dire aqui soy yo ! C’est la dialectique du verre à moitié plein ou à moitié vide…
Grande tarde de Colombo animateur né qui connecte avec le public et notamment avec les jeunes spontanément. Il brilla aux banderilles c’est son fonds de commerce, mais aussi à la cape avec un quite por zapopinas de derrière les fagots. Mais c’est avec « Almirante » que Colombo s’est grandi lors d’une faena complète, mettant en valeur les qualités de ce grand toro dans de longues séries animées, menées des deux côtés, dans le rythme parfait. Pas de trucage, pas de vulgarité, pas de cinéma pour obtenir la vie sauve pour son adversaire. Il le fit dans les règles, avec maîtrise et retenue. Il fut d’ailleurs chaudement remercié par l’éleveur qui sait de quoi il retourne.
Jorge Martinez c’est aussi une bonne surprise, vert encore il est vrai pour ce genre d’affrontement qui demande des nerfs d’acier. Le murciano a un concept original du toreo mené par Ruiz Manuel, il cherche comme lui le graal du toreo c’est-à-dire le temple, la lenteur, la douceur. Mais s’il n’atteint pas ces sommets réservés à une petite élite, il eut des moments dans ses débuts de faena notamment où il s’en approcha. Sa maladresse à l’épée le priva de tout espoir de récompense.
Ainsi s’achève une féria exceptionnelle où tous les jours eut son lot de satisfactions. Il y a ici de nombreux sujets de réflexion pour les organisateurs français : choix des ganaderias et des toros, montage des cartels, animations des tardes. Le succès populaire est allé de pair avec le succès artistique. C’est bien! Tout cela on le doit à Joxkin cheville ouvrière de ces trois jours qui a bien mérité de sortir en triomphe.
Un férion !
Pierre Vidal