
Le chaudron du coso del Pino était rempli aux quatre cinquième cet après midi et il fallait avoir du courage pour s’asseoir sur les gradins surchauffés, même si le paséo avait été retardé d’une heure pour cause de canicule forte. La septième corrida magellanesque (magallanica en espagnol) coïncidant avec le 125 e anniversaire de la plaza, nous avons eu droit à quelques nouveauté : les 22 tonnes de sel très artistiquement disposées en tapis rappelaient l’anniversaire des arènes, l’orchestre flamenco du guitariste Paco Vidal alternait avec plus ou moins de bonheur avec la banda de musica de Sanlucar, enfin l’alguazil certes toujours salade sur la tête, avait troqué la hallebarde pour une rapière portée du mauvais côté, à revoir pour l’an prochain. Enfin les picadors œuvrèrent un seul cheval en piste comme en corrida concours.
Le décor planté, passons aux acteurs de la soirée. Les toros tout d’abord. Les pensionnaires des frères Miura n’ont pas déçus un public beaucoup plu toriste qu’on ne pourrait le croire sur les berges du Guadalquivir. Les six étaient remarquablement présentés haut et longs, bien dans le style de la maison, six cent kilos de moyenne, formidablement armé le premier un peu plus discutables les autres mais plus que corrects pour une place de troisième catégorie. Il fut distribué onze piques, rarissime en Andalousie, les deuxièmes citées de très loin, les combats au cheval furent variables mais en général bons et excellent le sixième dont le picador Juan Francisco Roméro fut primé pour la meilleure pique. Le second obtint la vuelta al ruedo tous furent applaudis à l’arastre sauf le troisième sifflé. Aucun des six toros ne fut facile tous très encastés et proposant toutes les complications du sang Miura mais on était aussi venu pour cela et les trois diestros n’ont pas démérité :

El Fandi : deux oreilles et deux oreilles

Pepe Moral : deux oreilles et salut

Esau Fernandez oreille et division d’opinions.
Esau Fernadez qui, rappelons le, avait pardonné la vie à un Miura dans ces mêmes arènes il y a deux ans n’a pas réédité Son premier , le plus mauvais du lot, ne lui permit pas de briller et il ne trouva jamais les solutions face à la bravoure encastée du dernier qui aura permis à son banderillero Jose German Martin de se distinguer .
El Fandi a été comme à son habitude quand tout va bien : brillant pour ne pas dire rutilant dans un toreo a la fois puissant et baroque. Il a particulièrement brillé aux banderilles comme à son habitude rajoutant un très long épisode à cuerpo limpio a son premier dont les cornes dépassaient largement le burladero. A son second il agrémenta le deuxième tiers en toréant avec un sombrero de paille généreusement prêté par un spectateur. A la muleta le toro refusa toute humiliation dans la flanelle et le combat fut soutenu jusqu’au bout. Peu à peu le Fandi allonge la charge et améliore son opposant qui se soumet un peu quoique regardant parfois les planches mais le torero a tous les recours pour conquérir un public qui le suit. Le final est par molinetes précédant une demi pour le moins desprendida et suffisante. Il avait accueilli son second au capote comme le premier par une larga cambiada à genoux au fil des planches puis par véronique. El Fandi entame la faena par doblones genoux en terre avant de toréer sur les deux bords en allongeant la charge donnant de bonnes séquences sur les deux bords. Le final est plus que baroque utilisant le chapeau précédemment cité posé sur la muleta pour entrer a matar ce qu’il fit en deux temps mais le public était conquis par ce qui pour moi n’est qu’une pitrerie de plus, deux oreilles de plus et El Fandi se retrouve triomphateur de la corrida.
Pepe Moral est loin d’avoir démérité et ses deux oreilles à l’excellent mais âpre premier valaient le détour. Le toro saute d’entrée dans le capote et demande à être canalisé avant d’offrir les meilleures véroniques de la soirée. Pepe Moral entreprend son adversaire à droite à la muleta mais les passes sortent d’une en une sans pouvoir lier. Passant alors à gauche il découvre le bond bord de l’animal qui se livre alors pour une faena de menos à mas comportant de très bon moments. Le retour à droite ne pose plus aucun problèmes pour de bonnes séries bien liées. Pepe Moral en profite pour faire durer un peu mais sans jamais lasser, il conclue d’une bonne entière qui sera primée meilleure estocade de la soirée. Pepe Moral aura encore prouvé qu’il peut être un bon torero même si il n’a quasiment aucune opportunité de le prouver . Son second ne lui laissera aucune option malgré toute sa bonne volonté et il abrégera les débats.
Jean Dupin