Plaza de toros de Las Ventas, Madrid. Quatrième de la Feria de Otoño. Casi lleno.

Toros de Victoriano del Río y Toros de Cortés (4º et 5º)

SEBASTIÁN CASTELLA, silence après avis et vuelta al ruedo après avis.

PACO UREÑA, silence et vuelta al ruedo après deux avis. 

GINÉS MARÍN, silence et silence. 

Les banderilleros Rafael Viotti et José Chacón au quatrième.

Ovation pour le picador Ignacio Rodríguez au sixième.

Des toros imposants, lourds, hauts,  4 mansos dont un , le 5ème, recevra les banderilles noires, un grand manso encastado le 4eme, le reste sans mérite, comme le premier qui se laissera faire par Castella, plus que jamais au sommet, au courage sec, à la technique sans faille sauf à l’épée pour son premier .. puis, bis repetita, sur son second. Aucun doute, une grande épée à son second lui aurait valu les deux oreilles.

Un mot de Ginès Marin dont ce n’était pas le jour, particulièrement sur le 6ème dont il ne sut rien extraire, toréant de profil, écourtant la faena sans vraie motif, alors même que ce toro aurait pu prendre une troisième pique si le matador n’avait demandé le changement de tercio à la présidence après une deuxième puya impressionnante  qui valut d’ailleurs une ovation au picador Ignacio Rodriguez.

Paco Ureña est un torero rageur et courageux. Il hérite du second toro aux cornes en plumeau.  Vilaine pique trasera, le toro galope en sautillant, Ureña distribue quelques derechazos pas liés, le toro a un peu de genio, et le torero ne tentera ni ne fera rien sur la corne gauche. Le public, ce grand sage, s’ennuie un peu, on le comprend et Ureña ne fait pas durer le plaisir : il pinche trois fois, met une entière et écoute le silence, à Madrid le silence est grand ! surtout avec plus de 20 000 spectateurs. Toro bien entendu sifflé à l’arrastre. Son deuxième toro  un negro de 587 kg  est un manso perdido qui évite tout, le cheval, la moindre cape, il a une indifférence pour tout ce qui bouge et pourrait même avoir peur de son ombre.  Pétition du public  pour les banderilles noires enfin accordées par la présidence. 

Victoriano del Rio ronge son frein et attend la suite, tout comme nous. Curro Vivas chargé aux banderilles doit se jeter dans le callejon la corne lui effleurant la jambe au moment du plongeon dans le couloir. On va ensuite assister à un combat épique, le torero essayant de bâtir une faena avec cette absence de toro, sans doute pour démontrer que lui aussi, à l’image de Castella , peut extraire la lidia que tout toro contient, même  un manso perdido.  Et Paco ose tout, n’a pas peur , prend des risques fous, se fait accrocherà la mise à mort, reste au sol épuisé , se relève, pinche, met une entière, écoute un avis, panique à bord, deuxième avis et le toro tombe au quatrième descabello !

Malgré cela, devant le courage fou  le public craque et applaudit au moint fde permettre au matador une vuelta al ruedo,tandis que le toro est hué copieusement à l’arrastre.

Mais parlons de la faena quasi historique du 4ème par Sébastien Castella.

Oublions, tant il s’est sublimé au quatrième le beau travail qu’il offrit à son premier.

Le quatrième, donc !

Devoto, noir de 626 kg de Toros de Cortes, très haut, large, armé très fin né en février 2019.

A peine entré dans l’arène il fuit, positionné devant le cheval il fait mine de le charger , instant fugace dont le picador profite pour lui glisser un picotazo épidermique qui le fait fuir.  Castella en grand stratège  a deviné qu’il pourrait  faire quelque chose avec cet animal : il dirige et ordonne tout, le placement de José Chacon qui assure la lidia,  extraordinaire paire de banderilles de Rafael Viotti qui fait se lever le public, non seulement on ne s’ennuie plus mais on attend l’éclosion improbable d’une œuvre majeure. Et cette œuvre majeure, n’hésitons pas à le dire, ce sera la plus belle et méritoire faena de Sébastien Castella de toute cette année 2023 pourtant riche en grands moments. 

Personne n’oublie que Castella a été triomphateur de la San Isidro, qu’il est sorti la semaine dernière par la Porte du Prince à Séville, et il est là, devant nous, à Madrid, avec un toro impossible . Il fera tout à ce toro qu’on croyait vide , il le magnifiera par des passes d’une proximité  folle, finissant par 6 manoletinas de catégorie après des séries gauchères à couper le souffle, avec changement de main en lâchant la muleta .. une autorité  un poder incroyable, un ligazon qui vous fait frémir, et tout passe et le toro s’améliore devient entre les mains du magicien un grand toro manso qui découvre sa caste, car il existe ne l’oublions pas des manso encastados. Pureté des gestes, froideur qui cache la volonté indomptable, l’artiste est dans la plénitude ne manque que l’épée, trop basse pour permettre les récompenses majeures, mais une fois de plus le public ne se trompe pas, il est debout, hurle sa joie et son admiration, Sébastien Castella va saluer au centre et l’ovation est si forte qu’il entreprend sous la clameur une vuelta al ruedo qui me reste encore dans la tête au moment ou j’écris ces lignes.

Cette tarde de toros a été une étrange  chose, et in fine, ces mansos de Victoriano del Rio nous ont permis de juger et jauger  le caractère particulier des hommes qui les ont affrontés. Ureña  montant au front en se sachant battu mais qui ne craint ni le combat ni la défaite, Castella qui sait ce qu’il aura à faire, conduit, lui, l’assaut comme un chef de guerre génial.

Madrid aime Sébastien Castella, Madrid  a raison !

Jean François Nevière

Photos JY Blouin

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