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BORJA JIMENEZ AU CLUB TAURIN DE PARIS.

Le club taurin de Paris accueillait ce jeudi Borja Jimenez qui vient de vivre une temporada brillante après 7 années de galère. Accueilli par de chaleureux applaudissements, le maestro prenait place à la tribune et se livrait au feu des questions de la salle.

Accueil chaleureux pour Borja Jimenez au Club Taurin de Paris, le 23 novembre 2023. ©JYB

Sa vocation est née des tientas auxquelles il assistait vers ses 10 ans époque à laquelle ses toreros référents étaient Espartaco, Manzanares (père), Miguel Abellan, et un peu plus tard El Juli socle de sa passion pour les toros.

Pendant ces 7 années il a continué à s’entraîner quel que soit le nombre de corridas qu’il pouvait signer : il ne faut pas s’arrêter, au contraire. Heureusement les ganaderos (Martin Lorca, Murube, Julio de la puerta, Espartaco etc.) ont été accueillants et lui ont permis de tienter régulièrement. C’est grâce à cet entrainement qu’il a gagné ses cartels 2023.

En fait, paradoxalement, c’est la pandémie du COVID qui lui est venue en aide : Les ganaderos ont fait lidier au campo de nombreux toros qu’ils ne pouvaient vendre, des toros de respect le plus souvent faits pour les arènes de primera. Au cours de ces lidias privées, il s’est rendu compte qu’il était prêt et plus important, des apoderados et des empresas s’en sont aussi rendu compte, notamment Julian Guerra qui le fait entrer dans la Copa Chenel et à Madrid.

Borja Jimenez à la tribune du CTP encadré par Thierry Vignal et Araceli Guillaume. ©JYB

Il s’est donc installé à Salamanque avec Julian Guerra (qu’il considère comme un coach formidable et avec qui il ne pense pas qu’il puisse avoir des problèmes relationnels) qui l’a fait évoluer techniquement en prévision de la Copa Chenel où il tombe notamment sur un toro de Fuente Ymbro très fort qui lui permet de triompher. Mais le point clé de sa saison pour lui, est la corrida d’Escolar Gil à Pampelune, car à partir de là, le mundillo s’intéresse vraiment à lui et lui fait signer 6 ou 7 corridas en plus de Madrid. A propos de la polémique sur le retrait de points pour avis en demi-finale de la Copa Chenel, il considère qu’avec le temps ce ne sera qu’une anecdote, d’autant que ce système de décompte a été supprimé pour les prochaines éditions. Il regrette surtout que sa proposition de lidier en 3 ème de la finale les deux toros de Palha n’ait pas été retenue.

Mais le grand succès de sa saison est la corrida de Victorino Martin le 8 octobre à Madrid sur laquelle la salle l’a longuement interrogé :

C’est une première pour lui et Julian Guerra n’a pas voulu accepter sans avoir son accord, qu’il a donné immédiatement car il pensait qu’il pouvait s’y passer quelque chose de bien et, plus tard, à la veille de la corrida, il se sentait très concentré.

Les 3 semaines précédentes, il est allé tienter chez Victorino qui lui a expliqué, en théorie, comment lidier ses toros, (hauteur de la muleta, qui doit être très plate pour que le toro ne voie pas son corps, toque, etc.), passant beaucoup de temps avec lui. En voyant le résultat de ces conseils devant les vaches, la nervosité des premiers instants s’est effacée.

Paquecreas, n°46 de Victorino Martin, lidié en seconde position par Borja Jimenez qui va lui couper une oreille à Madrid, le 8 octobre 2023. ©JYB

Le toro de Victorino est très exigeant sur le plan technique et sur le don de soi. Devant lui, il ne faut jamais hésiter : si on arrive à le dominer, on en tire le meilleur. Selon Victorino, il faut le toréer en ligne droite au départ pour qu’il dure et ne venir au toréo en rond qu’ensuite. Mais à Madrid, le public ne réagit que sur le toréo en rond, donc il n’a pas pu totalement respecter cette règle. Par contre, Victorino n’a pas insisté sur le caractère « tobillero » de ses toros.

Plazuelo, n°22 de Victorino Martin, (tobillero) cherchant les chevilles de Borja Jimenez, à Madrid le 8 octobre 2023. ©JYB

À Madrid, alors que la grande porte était assurée après ses deux premiers toros, il a choisi d’aller à puerta gayola : Julian Guerra n’est pas intervenu dans cette décision. Lui, voulait d’abord la grande porte, mais aussi convaincre. Donc la porte du toril et la meilleure faena possible s’imposaient, même si le Victorino n’est pas facile à toréer à genoux.

Au cours de ses faenas on a remarqué la longueur de ses naturelles : certains toros le permettent, d’autres non ; il considère que c’est à lui de s’adapter. Les 3 Victorinos permettaient et il en a profité. Un aficionado a remarqué que ses toques étaient plus forts à droite qu’à gauche. Effectivement son premier toro présentait plus de difficultés à droite, il s’est adapté ! Pour les deux suivants, cela n’a pas été nécessaire sauf pour quelques passes isolées.

Naturelle croisée en chargeant la suerte de Borja Jimenez à Paquecreas, n°46 de Victorino Martin, à Madrid, le 8 octobre 2023. ©JYB

On a remarqué aussi qu’il était très croisé à Madrid. C’est une question de colocation. Le Victorino l’exige particulièrement, mais il essaie de le faire partout devant tous les toros. Car il ne veut pas de concept du toréo fermé ; il préfère un concept large pour pouvoir toréer tous les encastes et trouver le tracé adapté à chaque toro.

Pour la technique, a-t-il visionné ses faenas de Madrid ? Le soir même, c’était impossible car le téléphone n’arrêtait pas de sonner ! Il considère de toute façon qu’il vaut mieux le faire la tête froide après quelques temps pour une analyse critique moins émotionnelle et plus constructive.

A la question sur l’influence de son succès à Las ventas sur sa prochaine temporada, il souligne qu’il n’a plus le temps de rien faire (sauf l’entraînement) car il est invité partout : c’est ainsi qu’au sortir de la soirée, il se préparait à prendre un avion à 6 heures du matin pour rejoindre Salamanque et tienter en présence de l’empresa de Séville. Séville où rien n’est encore fait car l’empresa attend « les rois mages » pour commencer ses négociations. Mais il y a déjà plusieurs contrats signés et d’autres en cours, mais il ne dévoilera rien, l’annonce des cartels appartenant aux empresas.

Cependant, il a bien voulu concéder qu’un mano a mano avec son frère Javier était programmé en 2024.

Borja Jimenez devant Patatero, n°47 de Victorino Martin, à Madrid, le 8 octobre 2023. ©JYB

Pour répondre à la demande du public (et à celle de Victorino Martin qui a déclaré qu’il devait prendre ses toros), il considère que c’est vraiment un luxe de lidier les Victorinos, parce qu’ils ont du fond, qu’il faut aller les chercher et en extraire la substantifique moelle. C’est pourquoi, il veut les prendre mais dans les grandes arènes pour des publics connaisseurs, notamment en France (où il n’a jamais toréé depuis son alternative).

Ceci dit, il accepte de prendre des corridas dures, mais dans des endroits importants et veut aussi toréer avec les figuras et leurs toros. Ses élevages favoris : Victorino et l’encaste Albaserrada étant incontournables, il voit chez Santa Coloma La Quinta et Ana Romero, et par ailleurs, Victoriano del Rio,  Garcigrande parce qu’ils ont du fond et qu’il faut trouver leur charge. In fine il aspire à la variété.

À quelques questions plus personnelles il a souligné que dans les diners de famille on ne parle jamais de toros. Et que ses kilomètres de voyages et ses obligations l’empêchaient de rencontrer le public dans la rue, avec les selfies etc. Peut-être les vivra-t-il avec les fêtes qui approchent.

Auditoire conquis et enchanté de la prestation de Borja Jimenez au Club Taurin de Paris, le 23 novembre 2023. ©JYB

Au final, une excellente soirée où l’on a apprécié la sincérité et l’engagement du torero : encore une fois, les absents non excusés ont eu vraiment tort !

JY Bloin (texte et photos) https://facealacorne.fr/borja-jimenez-au-club-taurin-de-paris/

Novillos de José Escolar à Hagetmau

Toro de Jose Escolar pour Pampelune 9 juillet 2016 Nº45 – Cantador II – Né en Octobre 2011 – Cardeno Meano – 555kg

Les élevages de la Féria d’Hagetmau 2024 sont les suivants  :

samedi 27 juillet 

11 h : capea avec l’ école taurine Adour Aficion

18 h : Novillada sans picador avec des  erales de la ganaderia ALMA SERENA  (meilleur élevage 2023)

dimanche 28 juillet 

18 h  : Novillada  avec des novillos de la ganaderia Jose ESCOLAR  (meilleur toro à Madrid et Céret, 

                                                                                                                   meilleur novillo à Blanca en 2023)

Arles : le duo Jalabert/Casas gagne le concours

Selon le quotidien la Provence https://www.laprovence.com/ (L.R.) : Tauromachie : le duo Jalabert-Casas pour 5 ans à la tête des arènes d’Arles

“La société Ludi Arles Organisation de Jean-Baptiste et Lola Jalabert, délégataire depuis 2016, a été choisie par une commission d’experts.

À l’issue d’une procédure démarrée en avril dernier, l’appel d’offres dans le cadre de la délégation de service public pour la gestion des spectacles taurins des arènes d’Arles pour les cinq années à venir s’est achevé ces derniers jours.

La société Ludi Arles Organisation de Jean-Baptiste et Lola Jalabert, délégataire depuis 2016, a été choisie par une commission d’experts. Elle est ainsi reconduite jusqu’en 2028. La décision sera officialisée, et débattue, lors du prochain conseil municipal, le 24 novembre.

 Des changements sont intervenus pour ce concours âprement disputé avec l’équipe de LDS Concept, conduite par les directeurs des arènes de Saint-Gilles Pierre-Henry Callet et Julien Miletto, puisque Simon Casas, directeur des arènes de Nîmes et de nombreuses plazas en Espagne, dont Madrid, est entré dans le capital de Ludi Arles Organisation et en occupe le poste de directeur. Il rejoint dans l’organisation des temporadas arlésiennes Alain Lartigue, quatrième acteur de la société, déjà présent lors des dernières DSP confiées à Ludi Arles Organisation”.

Pampelune, les ganaderias

Voici les ganaderias retenues pour la San Firmin 2024. Un choix classique avec l’arrivée des toros de David Hernandez Martin qui feront leurs débuts dans le coso navarrais. Voici la liste des fers élus:

Miura de Lora del Río, Sevilla.

Victoriano del Río de Guadalix de la Sierra, Madrid.

Hros. de D. José Cebada Gago de Medina Sidonia, Cádiz.

Jandilla de Mérida, Badajoz.

José Escolar Gil de Lanzahíta, Ávila.

Fuente Ymbro de San José del Valle, Cádiz

La Palmosilla de Tarifa, Cádiz.

Domingo Hernández Martín de Traguntía, Salamanca

El Capea- Carmen Lorenzo de San Pelayo de la Guareña, Salamanca (rejones).

Ganadería de Pincha de Lodosa, Navarra (novillada).

Patrick Varin vu par Yves Lebas: “Ma vérité”

Durant cette respiration entre deux temporadas où l’actualité est rare -nous ne l’oublierons pas- revenons sur le passé. Grâce à leur directeur Jean Paul Laffont les éditions Gascogne dans la Collection La Verdad ont publié 15 livres sur les acteurs de la corrida depuis quelques années. Ces livres rédigés par de grands professionnels nous donnent de précieuses indications sur la tauromachie moderne. Ils n’ont pas bénéficié de la publicité qu’ils auraient méritée.

Après un extrait de l’ouvrage consacré à Curro Diaz le grand torero de Linares, voici que nous donnons la parole à Patrick Varin un des toreros les plus brillants de sa génération et qui dirige notamment la carrière d’El Rafi. Connu pour sa passion mais aussi sa fidélité et la qualité de son jugement, Patrick a été longuement interrogé par Yves Lebas président de l’école taurine d’Arles, écrivain et traducteur.

 Un ouvrage que l’on peut acheter sur tous les sites commerciaux en ligne ou commander dans toutes les bonnes librairies. Voici un large extrait du chapitre “Ma Vérité”:

PV

R – « Si la solitude te fait peur ne cherche pas à toréer ». Je me suis souvent fait cette réflexion… et c’est l’une des plus difficiles à appliquer ! Des plus douloureuses, aussi. Malgré le temps passé ensemble, malgré les conseils des uns ou des autres, apoderado, cuadrilla, « professionnels », proches, … au final tu es tout seul devant le toro. C’est toi qui prends les décisions, qui fais les choix, qui ressens ce que tu peux faire avec tes moyens et avec l’animal qui est face à toi, animal vivant et toujours changeant. Tant que tu ne sais pas ou ne peux pas prendre tes décisions ou faire ces choix tout seul, tu n’as pas trouvé ta voie de torero.

Aller au bout de notre art c’est explorer les limites d’un engagement qui peut aller jusqu’à la mort. Devient-on alors un monstre qui souffre et fait souffrir sa famille, son entourage parce qu’il est au seul service de son art ?  Ou peut-on rester quelqu’un de bien, une « bonne personne » attentive aux autres, au détriment de son art ? C’est un dilemme que connaissent tous les artistes, mais il se charge chez les toreros d’une inquiétude dramatique puisque la mort possible est au cœur même de notre art.

Q – Mais peut-être, comme tout choix impossible, est-ce une question avec laquelle il faut vivre mais qu’on ne saurait trancher définitivement. Et parce qu’elle est là, elle pousse au dépassement, à la poursuite d’un idéal qui existe puisqu’on le rêve mais qu’on n’atteint jamais, puisqu’il est inatteignable ?

R – Je garde au fond de moi ce rêve de toréer doucement…, toujours plus doucement, encore plus doucement ! Je sais que là est la vérité du toreo. Une vérité esthétique, bien sûr. C’est la lenteur douce que donne à entendre le toreo. La fameuse « música callada del toreo », cette « solitude sonore » qu’illustrait Belmonte.

Q – Toréer avec lenteur c’est aussi toréer avec courage ?

R – Ceux qui se mettent devant un toro comprennent ce que signifie l’affirmation « torear despacito es la demonstración más pura del valor »[1]. La démonstration et la vérité. En effet, plus la passe est lente, plus longtemps il faut maîtriser la charge du toro, le garder fixé dans le capote ou la muleta, et plus longtemps on reste exposé au danger de la corne…

Pour toréer doucement il faut dominer réellement le toro. Tu freines sa charge et l’obliges à suivre ton rythme, en baissant la main. C’est cela toréer « vraiment » en t’imposant au toro mais en t’offrant le plus à son danger.

Q – On confond souvent lenteur et « temple »

R – Toréer avec temple c’est harmoniser la passe, le mouvement de la cape, à la charge du toro au point que toujours il poursuit le leurre sans jamais l’atteindre.

 C’est comme quand tu déplaces un clou avec un aimant sans qu’il ne le rejoigne jamais. Tu dois maintenir la bonne distance. Tu vas trop vite ? Le clou s’arrête. Tu avances trop lentement ? Le clou rattrape l’aimant… dans les deux cas, c’est raté. C’est pareil pour les cornes du toro suivant les plis du capote ou la muleta. Le temple, permet la profondeur. Il lui est nécessaire.

Q – Tout compte pour toréer comme on le sent. Comment choisit-on les capotes et muletas avec lesquelles on va toréer ?

R – L’attention au choix des trastos, ça ne m’est pas venu tout de suite. Au début, comme novillero, l’important était de me mettre devant un toro et de le toréer. Je ne regardais pas trop les outils que j’utilisais. Ou alors c’étaient des raisons « romantiques ». Je me souviens que lors de ma présentation à Madrid, j’ai affronté mes novillos avec une vieille muleta offerte par Curro Vazquez. La référence à Curro était pour moi le plus important…

Ce n’est qu’une fois l’alternative passée que j’ai commencé à y prêter une attention de plus en plus pointilleuse, un soin de plus en plus méticuleux. La taille, le poids, la coupe, les tissus, les couleurs même, tout compte, tout importe. Si je préfère des capotes au rose lumineux plutôt que violets, c’est surtout la taille – je choisis toujours un capote de 116 cm[2] – et la texture qui m’importent. Je recherche des trastos « flojitos » (souples). Ils doivent accompagner et donner du « vuelo » (envol) à la passe. Alors je n’aime pas trop ces capotes dont le tissu contient trop de fils de nylon, rigides et difficiles à casser. Même en les usant artificiellement comme on fait avec les jeans…

Q – Mais s’ils sont trop souples, est-ce qu’il n’y a pas de risque d’envol involontaire à cause du vent, cette « troisième corne » qu’on connait bien dans le sud-est avec le mistral ou la tramontane ?

R – Ou à Madrid ! Curro Vazquez, encore lui, expliquait que, quand il toréait à Madrid, il choisissait une chambre d’hôtel d’où on ne voyait pas d’arbres qui puissent lui indiquer s’il y avait du vent quand il se levait … il préférait le découvrir le plus tard possible ! Le vent est un mauvais lutin qui donne un coup de pied dans la cape ou la muleta au mauvais endroit et au mauvais moment.

Si les trastos souples donnent du mouvement, le mouvement initial, ce « toque » si important qui attire l’attention du toro et engage sa charge, doit être donné au bon moment, au bon endroit, et n’obéir qu’au seul geste du torero. Comment combiner souplesse pour permettre le « vuelo » et rigidité pour résister aux sautes malicieuses du vent ? Bernardo Valencia m’en a donné l’idée au Vénézuéla où il arrive que le vent souffle assez fort. Il mettait des poids dans certaines parties de son capote.

Partant d’un tissu assez souple, ou que j’avais assoupli, cassé, vieilli, je durcissais certaines zones avec une espèce de colle à bois de mon invention pour rigidifier certaines parties du capote ou de la muleta.

L’importance du choix de bons outils que, nous, nous avons appris au fur et à mesure de nos expériences pratiques, les élèves toreros d’aujourd’hui le savent très vite. Et c’est une très bonne chose.

Q – Comme tu l’as dit, plus la passe est longue, plus la proximité entre toro et torero se prolonge. Est-ce cela que l’on appelle la profondeur ? Et n’est-ce pas la mise en scène de la torería ? 

R – Je disais tout à l’heure l’impact qu’avait eu sur le gamin que j’étais la photo de Pepe Luis Vázquez toréant à la véronique, photo que j’avais trouvée dans La Tauromachie de Popelin. En tâchant de comprendre ce qui me fascinait je me suis demandé si ce n’est pas la sensation de durée que donne l’absolu naturel du geste, immobilité en mouvement. Il n’y a là rien qui paraisse forcé, qui donne le sentiment de l’effort. Dans le même temps toro et torero donnent chacun l’impression d’être complètement absorbés dans leur geste, le toro poursuivant la cape, le torero la déployant devant son mufle pour le caresser et l’entraîner. Et l’on comprend la référence à Sainte Véronique nettoyant la face de Jésus. Je crois que c’est cela que l’on appelle la profondeur, expression indéfinissable, comme le duende.  

Q – Même si le rapprochement avec les anges et le ciel peut paraître paradoxal, c’est comme cela, en allant au fond de lui-même, que le torero atteint la profondeur du toreo ?

R – La profondeur touche à l’infini. Ce qui donne de la profondeur à un muletazo c’est quand, au moment même où toi-même, et ceux qui te regardent aussi, tu crois qu’il se termine, tu le prolonges avec un jeu de ceinture et de poignet. Alors le toro poursuit le leurre comme à l’infini et « les horloges s’arrêtent ». En fait on donne une sensation que le toro rentre dans le muletazo et tombe dans un puits profond, le fond du puits étant la fin du muletazo. Regarde Curro Romero[3], il est l’exemple de comment, même avec la muleta à mi-hauteur et malgré le poids des ans, on peut toréer avec profondeur.

Ce n’est pas qu’une question esthétique. Un muletazo linéaire peut être esthétique, joli à regarder. Mais il n’est pas profond. Quand tu donnes des passes en ligne droite tu ne peux pas être profond, tu n’es que linéaire !

Par contre quand tu te croises au maximum et que tu sors media muleta, totalement “encajado” sur les reins et abandonné sur les talons, que tu oublies le danger ou plutôt tu acceptes de dépasser la ligne rouge, tu te donnes entièrement et tu torées vraiment. Curro Romero le dit parfaitement, et je fais mienne son observation : ” c’est quand tu as les pieds enracinés dans le sol que tu atteins le ciel”.

Q – Le torero « atteint le ciel » ou démontre, comme l’affirme Sanchez Mejías, pourquoi il est un ange… Ne pourrait-on parler alors de pureté du toreo ?

R – Ça me semble moins grave ! Je crois que la pureté dans le toreo c’est essentiellement une question de bon goût, le contraire de la vulgarité.

Je reconnais que la vulgarité est une chose que je déteste. Je tiens sûrement cela de mon père. Il m’a appris le plaisir du travail bien fait et le souci du bon goût, que cela concerne les paroles, les gestes, les vêtements, les attitudes. On retrouve tout cela dans la tauromachie. Et parce que la corrida est quelque chose de grave il faut la traiter avec respect. Je crois que la pureté dans le toreo n’est qu’une question de bon goût.   

Q – C’est cela la manière de transmettre, de surmonter le dilemme entre « porter sur le public » et « bien toréer » ?

R – Au terme de toutes ces années d’interrogations et de doutes sur ce que je croyais être un choix entre plaire au public ou accéder à l’art, la nécessité impérative de transmettre au public tout en poursuivant un rêve d’artiste, il m’arrive de dire à ceux qui m’interrogent : « c’est simple, il suffit de se poser sur les talons sans bouger, de mettre les reins et se passer le toro tout près ».

Atteindre l’économie de gestes suppose souvent, toujours en fait, plus de travail et de maîtrise de soi que des figures souvent spectaculaires mais pas toujours fondamentales. Il ne faut pas confondre ce « naturel », ce relâchement du corps mais pas de l’esprit, façonné par des heures et des heures de travail, avec le savoir-faire technique. Je crois plutôt que c’est ce qui permet de l’occulter, le dépasser, et accéder à l’expression de sa liberté, voire sa folie, créatrice. En lui ouvrant la porte, le torero ouvre la porte au duende.

Bien sûr c’est plus facile à dire qu’à faire, et il m’a fallu des années et bien des angoisses pour le comprendre. Mais je suis de plus en plus convaincu que la simplicité et le naturel sont la clé, y compris, surtout, vis à vis du public. C’est en tous cas ma vérité. Non pas LA Vérité, vérité unique avec un V majuscule. Chaque torero a sa vérité comme il a son mystère. D’ailleurs j’adore écouter d’autres personnes, toreros ou non, parler de leur manière de comprendre et interpréter la tauromachie. Ça provoque ma réflexion et ça m’enrichit.

Q – En parles-tu avec Rafi,

R – Je me suis toujours gardé d’imposer mon toreo à mes élèves, ou même de le donner en référence. Mais aujourd’hui, j’ai le sentiment que Rafi a suffisamment avancé pour que je puisse lui faire valoir la dimension esthétique et artistique du toreo qui m’a toujours animé. Nous parlons plus d’égal à égal, je suis moins un modèle qu’il faudrait imiter qu’une référence dont il peut se nourrir pour donner plus de sens, de profondeur à sa tauromachie. Alors je n’hésite plus à lui faire part de mes goûts !

Q – N’y a-t-il pas une fausse symétrie entre toro et torero par rapport à la blessure et la mort. Elle est pratiquement certaine pour l’un, le toro. Elle doit demeurer incertaine et exceptionnelle pour l’autre, le torero. Est-ce que cela peut justifier la mort du toro ?

R – La mort probable du toro et celle, possible, du torero sont liées. Je me souviens que, à mes débuts, j’allais aux abattoirs de Nîmes pour m’entraîner au descabello. Je n’y arrivais pas. Ça m’était impossible… en face le toro n’avait jamais eu l’opportunité de se défendre, il n’avait pas pu exprimer sa bravoure, nous n’avions pas célébré ensemble sa noblesse.

Comme le dit Francis Wolff « ce qui fait la valeur de cette mort, c’est le prix que l’on attache à ce vivant ». Le vivant n’avait eu aucun prix, sa mort ne valait rien !… C’était insupportable, et moi je me sentais malheureux et incapable.

[

Gimeaux : unique oreille pour El Chechu

Pourtour bien garni, temps relativement agréable, léger vent. Bétail de François André inégal de forces et comportement, piqué par Luc Tosello.

che23k

José Ramón García « Chechu », matador de toros de San Sebastián de los Reyes (Madrid), a démarré les hostilités avec un toro préservé à la pique avant d’être banderillé par Thomas Ubeda. Lors d’une faena variée, Chechu a trouvé de quoi, par moments, étaler une torería séduisante. Et comme il tua bien, du premier coup, une oreille tomba du palco. L’unique de cette tarde…

co23k

Carlos Olsina prit le relais avec un client qui poussa au cheval avant des banderilles du Chino puis un brindis au public. Le Biterrois soigna le geste lors d’un trasteo entretenu et alluré, plusieurs séquences méritant la mention. Mais une conclusion peu probante est hélas venue rabaisser l’impression laissée. Silence.

jc23k

Enfin, Joachim Cadenas, qui avait délassé le crochet pour compléter ce cartel, eut à s’entendre avec un adversaire piqué a minima. Il brinda au respectable une faena démarrée par deux cambios au centre et qui par la suite, face à un novillo exigeant, a été marquée par la volonté de Cadenas de trouver la clé des problèmes posés. Trasteo énergique avec spectaculaire voltereta, sans  conséquences toutefois, dernières velléités honorables, mais des longueurs dans la conclusion ont quelque peu terni la note. 

Paul Hermé http://torofiesta.com

Borja Jimenez au club taurin de Paris

On dit parfois que la plaza de Madrid a perdu de son pouvoir de “dar y quitar” sur les carrières des toreros. Pourtant, il ne se passe pratiquement pas une saison sans qu’un, parfois plusieurs toreros, relégués au “monton” ou jeunes aspirants au vedettariat, soient propulsés sur le devant de la scène par un ou plusieurs succès à Las Ventas. Cela a été le cas cette année d’un torero originaire d’Espartinas, près de Sevilla, comme son glorieux aîné “Espartaco”, novillero plutôt en vue mais qui avait disparu relativement vite après son alternative sévillane de 2015. Cette année, plusieurs actuaciones remarquées à Madrid lors des corridas de juillet lui ont valu de figurer à l’Automne au cartel de la corrida de Victorino Martin, où, devant tuer trois toros du fait de la blessure de “Roman”, il a coupé l’oreille de chacun des trois et est donc sorti par la Grande Porte, entrant de plein droit parmi les révélations de cette fin de temporada, au point que certains ont pu dire qu’il était en train de devenir le nouveau spécialiste des corridas de Victorino. Le Club taurin de Paris aura donc l’honneur d’accueillir:

  BORJA JIMENEZ

 le jeudi 23 novembre à partir de 20h(lieu restant à déterminer)

Cette réception s’inscrit dans la grande semaine de l’aficion parisienne destinée à rappeler la victoire sur la funeste proposition de loi Caron d’abolition de la corrida en France et suivra de 24 heures la réunion inter-clubs ayant vocation plus spécifiquement à fêter cet évènement.

Merci de vous inscrire le plus vite possible par retour de mail ou à l’adresse suivante: clubtaurindeparis@gmail.com

Amitiés aficionadas,

Le bureau

Lima: De Justo pour Cayetano

Emilio de Justo Victorino Martin Dax 07092019 © Ferdinand De Marchi

Emilio de Justo remplacera Cayetano le 12 novembre dans les arènes d’Acho . Le président de la société Consorcio América Taurina (CAT), Felipe Negret, a opté pour l’un des noms de la
saison 2022, après avoir réussi à ouvrir la Puerta Grande de Madrid. Emilio de Justo complète ainsi une affiche de haut vol, dans laquelle sont annoncés / Sebastián Castella et Roca Rey. Les taureaux appartiendront aux ganaderias de San Pedro et Paiján . Ce sera le deuxième après-midi de Roca Rey, puisqu’il sera chargé d’ouvrir la feria le 28 octobre en tête-à-tête avec Joaquín Galdós.

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